LES FRUITS DE L'ORGUEIL
Extrait du père François Zannini dont le récit complet est paru à "Stella Maris" d'octobre 2015


L'orgueil est un défaut qui, mal corrigé ou pas corrigé du tout, produit sept fruits exécrables rendant la vie sociale insupportable. Il secrète la vantardise, défaut consistant à faire souvent son propre éloge ; l'amour d'être glorifié consistant à tirer vanité des paroles d'autrui ; l'hypocrisie nous faisant jouer un personnage et refuser d'être une personne ; l'entêtement refusant l'opinion d'autrui pouvant être préférable à la nôtre ; la discorde provenant du refus de renoncer à notre liberté pour favoriser la paix ; la querelle se produisant par la vie de nos désirs contrariés ; la désobéissance se manifestant par notre refus à une loi supérieure.

L'orgueil est donc un vice qui enracine l'homme dans une opposition systématique à l'œuvre de Dieu en lui. L'orgueilleux va refuser la vérité de Dieu, sa morale et très souvent sa grâce. Ainsi il va s'enfermer dans un vice dont il ne sortira plus, à moins qu'il implore l'humilité divine et reçoive la grâce de la contrition et de la conversion pour se relever et aller vers Dieu par une bonne confession.

Sans cette démarche, l'orgueilleux peut s'enfoncer dans tous les vices, car l'orgueil est le principe de tous les péchés (Si lO,13). L'orgueil conduit à la désobéissance d'Absalom contre David son père, à la cruauté d'Hérode contre les saints innocents d'Israël, à la jalousie et à la luxure de David convoitant Bethsabée et désirant la mort de son mari Uri pour la ravir à jamais. Dieu permet toujours que l'orgueilleux tombe dans des péchés graves, afin qu'il reconnaisse sa misère et s'en corrige. Ainsi l'orgueil conduit l'homme à de multiples humiliations, car Jésus nous dit: « Celui qui s'élève sera abaissé.» (Lc 14,11) La foudre s'abat toujours sur les sommets et souvent on abat un bel arbre parce qu'il est trop haut. De le proverbe: «Dieu ne laisse pas croître les arbres jusque dans le ciel. » L'orgueil conduit l'homme à sa perte éternelle «car c'est l'orgueil qui a chassé les démons du ciel et nos premiers parents du paradis terrestre», écrira saint Bernard. Que l'homme se rappelle bien ceci : «Quand le démon veut précipiter quelqu'un en enfer, il le conduit au sommet d'une montagne.» ( Saint Bonaventure)

L'orgueil anéantit également la valeur de nos bonnes œuvres. «L'orgueilleux a déjà reçu sa récompense ici- bas (Mt 6,5). Et comme la rouille ronge le fer, l'orgueil dévore les bonnes œuvres de l'homme », dit Saint François de Sales.

Voici un cas d'orgueil qui se termina dans la douleur : «Un général américain n'avait que sarcasme et mépris pour la religion. Par contre, son épouse était fort pieuse. Elle réussit de bonne heure à inculquer à sa fille unique, que tous deux chérissaient, l'amour de Dieu et de la religion, malgré l'influence opposée du père. La petite fille tomba gravement malade. Son état fut bientôt désespéré. "Papa, mon cher papa, dit l'enfant, je vais mourir dans quelques heures. Je t'en prie, dis-moi ce que je dois croire, ce que tu as toujours dit ou bien ce que maman m'a appris du ciel et du Bon Dieu." Le général fut profondément bouleversé. Les larmes aux yeux, il répondit: "Mon enfant, crois ce que ta mère t'a toujours dit." "Alors toi aussi, il faut que tu croies au Bon Dieu", fut la réponse logique de l'enfant. Le père n'oublia jamais la dernière prière de sa fille, il reprit le chemin de l'église, si longtemps abandonné et se sentit mille fois plus heureux qu'auparavant. "

Cela paraît triste et navrant que ce général revienne à Dieu après la mort de son enfant et son rappel à l'ordre de communier avec elle dans l'amour éternel de Dieu. Mais n'oublions pas que Dieu résiste aux orgueilleux (1 P 5,5) et que le Seigneur a dispersé les hommes au cœur superbe, qu'il a renversé les puissants de leurs trônes et élevé les humbles. (Lc 1,51-52) C'est pourquoi l'homme doit s'humilier devant Dieu, «car il n'y a pas de plus grand mal que d'avoir Dieu pour ennemi», écrira saint Jérôme.